Quand la justice nous casse

Entre l'âge de six et huit ans, il subit de nombreuses violences physiques à l'école, administrées presque chaque semaine par deux grands dans la cour, qui lui ligotent les pieds, le pendent la tête en bas dans un recoin du préau, en cachette, et le menacent de mort, le couteau à la main. Philippe ne dira rien. Ils menacent de le tuer définitivement s'il parle. Mais ce passé de violences subies demeure tapi dans l'ombre, tel un ressort. Au bout de dix années de service comme responsable bénévole d'un centre d'accueil, surmené, il devient de plus en plus violent avec ses équipiers, et donnera même à certains de graves châtiments physiques répétés. Puis, grâce à un suivi de personnes extérieures, il désamorce la bombe qui est en lui, explore ses racines, pleure et demande pardon à ses victimes. Il change. Deux années plus tard, suite à des influences extérieures, l'esprit de vengeance reprendra le dessus : deux des victimes portent l'affaire en justice. La troisième refusera d'elle-même. Garde à vue, démission immédiate et obligée de toute activité, mise en examen de trente mois avec mesures sévères, enquêtes sans fin, procès puis incarcération. Quinze mois de détention à Rennes puis à Nantes. Philippe Auzenet décrit sa chute et son relèvement. Il redevient pasteur et voyage. Il parle du monde judiciaire actuel, qui frôle souvent l'injustice par sa froideur et sa lenteur. Il raconte aussi beaucoup la prison : la plus vaste entreprise légale de découragement, de dépersonnalisation et d'hypocrisie de son pays, l'école du vice, de la non-insertion, de la récidive. Une machine à broyer qui, sous couvert d'expiation, de punition, de réparation et de mise à l'écart, casse quelquefois définitivement la plupart des 80 000 personnes qui y entrent chaque année.

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